Les histoires de frangins ? Depuis Abel et Caïn, on connaît. Mais voici que Mahir Guven, 31 ans, écrivain français d’origine kurque et turque, renouvelle le genre en propulsant deux frères au milieu des tourments contemporains. À travers le destin croisé de deux garçons élevés en banlieue, il brosse le portrait d’une société qui n’a que faire de ces gosses, qui par défaut troquent le foot pour la mosquée en passant par les vapeurs du joint pour mieux diluer leurs rêves. Nés d’un père athée et laïque qui a fui le régime syrien et d’une mère bretonne dont ils n’ont pas fini de faire le deuil, ces deux-là se cherchent une identité. Un destin ? Quand s’ouvre le roman, Grand frère est chauffeur VTC pour se refaire une virginité après une carrière de dealer, tandis que Petit frère, infirmier de métier, part sans préavis jouer les héros en Syrie.

 

Pour ceux qui restent, entre incrédulité, colère et inquiétude, c’est un cataclysme. Faire le jihad pour sauver le monde ! Pourquoi ce rêveur a-t-il cédé aux sirènes de la religion et à ses prosélytes barbus ? «Pour faire le beau, jouer les cadors, donner des leçons de morale ?» Un beau jour, l’interphone sonne : Petit frère est de retour et avec lui les emmerdes. Qu’est-ce qu’il croyait, qu’il pouvait «jouer les colombes au milieu de la mort» et revenir ni vu ni connu dans un pays meurtri par les actes terroristes ? Grand frère est pris dans un conflit de loyauté. Doit-il le dénoncer, l’héberger au risque d’en devenir complice, organiser sa fuite ? Roman social et familial ultrapositif, il y a du Malaussène dans ce livre fougueux. De l’humour, de la tendresse et un indéniable talent de conteur.

“Grand frère”, Mahir Guven, éditions Philippe Rey, 22 dollars.

Une erreur s'est glissée dans la biographie de l'auteur  : Mahir Guven est né en France, de mère turque et de père kurde réfugié  en France.  Sa famille n'a donc aucune relation avec la Syrie comme précédemment écrit.