L'identité de base entre le solde de la balance courante et le solde des comptes de capital et financier signifie que le solde des opérations courantes est compensé par la variation des actifs extérieurs nets. Un déficit correspond ainsi à la cession d'actifs domestiques à l'extérieur (titres de créance sur l'État ou sur les banques domestiques ou sur les entreprises, ou titres de propriété portant sur des terrains ou des entreprises, etc.) et à la cession d'actifs extérieurs (réserves de la Banque centrale, avoirs des banques commerciales, titres de créance et de placement à l'étranger, etc.). Cette diminution des actifs extérieurs nets (ce que le pays possède à l'extérieur moins ce que l'extérieur possède dans le pays) signifie que l'économie domestique devra, à l'avenir, verser à l'extérieur des revenus attachés aux actifs cédés (intérêts, dividendes, plus-values) [ou recevoir moins de l'extérieur] et devra, pour toutes les créances accumulées, supporter la charge de devoir éventuellement les rembourser.
Les comptes de capital et financier, tout comme le compte des opérations courantes (dont il est symétrique), donnent donc une image synthétique des relations d'une économie avec l'extérieur. Mais sa structure en elle-même est extrêmement importante :
• Les investissements n'ont pas le même effet sur l'économie que les mouvements de capitaux financiers (dépôts bancaires et titres de créance). Et parmi les investissements, l'acquisition de titres fonciers (considérée d'ailleurs comme une opération de financement) est loin d'avoir, pour l'économie, les mêmes effets qu'un investissement dans une entreprise qui produit de la richesse et des emplois. Il faut clairement distinguer les deux significations du terme “investissement” : dans les comptes de la balance des paiements, il recouvre toutes les transactions financières, alors qu’en termes économiques, il ne s’applique qu’aux accroissements des capitaux fixes impliqués dans la production. Ainsi, pour la balance des paiements, l’achat d’un terrain ou des transactions de portefeuille (achats d’actions ou d’obligations) sont des investissements, alors qu’en termes économiques, ils n’ajoutent absolument rien au capital investi.
• La forme juridique des capitaux est importante : un investissement “productif” signifie un engagement long dont la rémunération est liée aux résultats de l'activité qu'il finance, surtout s’il s’agit d’activités contrôlées par l’investisseur ; en revanche, un placement financier, surtout s'il est court (c'est le cas en particulier des dépôts bancaires), exige une rémunération inconditionnelle et reste sujet à des retraits à brève échéance ; cela implique la nécessité d'attirer, en complément, des réserves pour faire face à cette volatilité et alourdit d'autant le coût effectif.
• L’étude de la balance des paiements est bien plus ancienne que celle de la comptabilité nationale. Elle remonte à l’époque des mercantilistes, avec Colbert comme emblème. Une idée simple prévalait : le pays devait dégager un excédent commercial pour s’enrichir à travers l’accumulation de l’or. Cette vision est dépassée. Mais il reste que l’on doit se préoccuper de la soutenabilité de la balance des paiements à l’instar de celle de la dette publique. Il existe des similitudes entre les deux approches, notamment au niveau de la dualité des stocks et des flux : la dette publique, les capitaux volatils et l’endettement extérieur court sont des stocks ; le solde budgétaire et la balance courante sont des flux. Mais la tâche est encore plus difficile avec la balance des paiements, car la dette obéit à des maturités déterminées, alors que les flux de capitaux, avec le développement des marchés financiers, n’obéissent pas à des échéances prédéterminées, les obligations longues peuvent être vendues en un instant et, s’il n’y a pas acquéreur, l’effondrement de leur prix risque de déclencher un effet boule de neige. C’est pour cette raison que les comptes de la balance des paiements ont laissé tomber la distinction entre “court” et “long terme”.