Un article du Dossier

Cinéma libanais : comment entrer dans la cour des grands ?

Depuis 2007, sa société Orjouane Productions a produit près de 15 longs-métrages de fiction et documentaires.

Greg Demarque
Sabine Sidawi sort tout juste d’un tournage. Un film expérimental du réalisateur français Éric Beaudelaire qu’elle coproduit avec sa société Orjouane Productions. Productrice exécutive, elle a dû organiser les deux semaines et demi de prise de vue, les déplacements des équipes, l’acheminement du matériel à partir d’un budget “serré”.
Jongler avec les coûts, Sabine Sidawi sait faire. Elle a été productrice exécutive sur une dizaine d’autres projets que les siens. Mais elle considère que son rôle n’est pas seulement de gérer un porte-monnaie et est toujours très impliquée dans le développement d’un film. Son dernier long-métrage présenté en ouverture du festival de Sundance, “May in Summer” de Cherine Dabis, était financé en coproduction avec la Jordanie et les États-Unis. Elle raconte avoir beaucoup travaillé le scénario avec la réalisatrice, car la productrice déléguée était aux États-Unis. « Je fais un film par an, mais je le tiens du début à la fin », explique-t-elle.
Orjouane Productions a été créée en 2007. Son défi est de faire vivre sa société afin de continuer à produire des projets qui lui tiennent à cœur. Si elle devait comptabiliser ses heures de travail par rapport aux bénéfices engrangés, Sabine Sidawi admet qu’elle ferait mieux d’abandonner. « Le problème, c’est que j’aime trop ce métier », avoue-t-elle dans un sourire.
Alors elle continue de se battre pour rassembler des budgets « grâce à des fonds, des amis, des coproductions et des festivals », même si parfois elle aurait des raisons de se démotiver. Le film de Danielle Arbid “Beirut Hotel” qu’elle a produit est interdit de projection au Liban, « pour non conformité au scénario censuré » selon la Sûreté générale. L’histoire d’amour au centre du film se déroulant sur fond de thriller politique après l’assassinat de Rafic Hariri. Sabine Sidawi a décidé de se battre pour obtenir l’autorisation de le diffuser, elle a intenté un procès au Conseil d’État, une première au Liban pour un cas de censure de film. Mais elle sait qu’elle ne rentrera sans doute jamais dans ses frais : avec les DVD piratés qui circulent en ce moment, si le film sort un jour en salle, très peu de spectateurs se déplaceront pour le voir. Son combat est ailleurs, elle souhaite contribuer à trouver une solution au problème de la censure qui participe à brider la créativité des réalisateurs, base de toute bonne production.
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