La direction générale des recettes du ministère des Finances prohibe depuis peu toute possibilité de financement interne d’une société offshore libanaise à travers des emprunts contractés auprès de ses actionnaires.

Cette position est apparue dans le cadre de deux réponses ministérielles datées de mars et de juin 2013 concernant le fondement de l’article 26 du nouveau code de procédure fiscale. Une décision que dénonce l’Association libanaise pour les droits et les intérêts des contribuables (ALDIC), estimant d’une part qu’elle est « illégale » car elle émane d’un service administratif qui n’est pas habilité à « légiférer » sur les questions d’imposition et d’exemption » et, d’autre part,« parce qu’elle se fonde sur des faits inexacts pour imposer une condition non prévue par la loi ».

Pour l’avocat fiscaliste Karim Daher, l’un des membres fondateurs d’Aldic, l’administration fiscale ne tient pas compte du fait que la réglementation des sociétés anonymes, y compris la possibilité d’être financée par des comptes d’associés, s’applique à certaines de ses formes spéciales, telles les offshore, sauf en cas de mention contraire spécifique et explicite, ce qui n’est pas le cas ici présent. Selon lui, l’administration fiscale interprète de façon abusive et extensive un article (article 1 (9) du décret-loi No 46/83 modifié par la Loi No 19/2008) de la loi sur les offshore destiné à définir le mode de financement des ses activités définies par l’objet social à des lignes de crédits et des emprunts auprès des banques et des institutions financières domiciliées au Liban ou à l’étranger.

« C’est une interprétation extensive contraire à la volonté du législateur, car l’article concerné s’inscrit d’une part dans un objectif de réglementer le financement tiers ou externe (ce qui n’est pas le cas des actionnaires) et il vise d’autre part, à déroger au principe général de prohibition de tout contact ou activité sur le territoire libanais en permettant le financement par le biais des banques et institutions financières domiciliées et/ou exerçcant au Liban. »
Dans un communiqué, Aldic dénonce aussi une « tendance à l’inquisition fiscale à l’encontre de la structure offshore que le législateur libanais a voulue souple et attractive pour les investisseurs ».

Selon Aldic, les comptes courants des associés, qui sont utilisés par toutes les sociétés anonymes,dont les offshores, sont devenus aujourd'hui des instruments de gestion financière efficaces permettant aux sociétés de gérer leur trésorerie, et de financer certains investissements, à travers ces instruments de crédit.
L’interdiction du recours à ces comptes d’associés pourrait aboutir à la requalification des opérations de la offshore et à l’application des mesures coercitives la soumettant au taux d’imposition normal applicable aux sociétés de capitaux de type normal,soit un cumul de 23,5 %, auquel s’ajouterait une pénalité de 50 %, alors que la offshore est normalement exemptée de ces impôts directs sur le revenu et sur les dividendes.

Aldic qui a envoyé une lettre de protestations au ministre des Finances rappelle qu’il y a tout juste un an, une tentative similaire visant à priver les sociétés holding d’une possibilité de financement interne (directive du ministère des Finances n° 1854/s1 du 29 mai 2012), a fait l’objet d’un recours devant le Conseil d’Etat pour excès de pouvoir, ce qui a conduit le ministère à suspendre ses mesures.