Le ministère de l’Énergie et de l’Eau a signé un contrat avec la société américaine Neos Geosolutions pour une évaluation grâce à une technique aérienne du potentiel pétrolier et gazier du sous-sol libanais. Baptisé “CedarsOil”, le projet, qui devra démarrer dans quelques mois, est une première dans la recherche de traces d’hydrocarbures sur le sol libanais depuis les tentatives avortées dans les années 1960. Ce projet intervient alors que 46 compagnies ont été qualifiées en avril dernier pour participer au premier appel d’offres pour l’attribution de licences d’exploration dans les eaux territoriales. « Les études sismiques prometteuses dans la zone offshore nous ont encouragés à entreprendre ce projet. D’autres signes sont également encourageants, comme l’existence de pétrole et de gaz en Syrie, ou encore les récentes découvertes de traces d’hydrocarbures autour de la mer Morte entre la Cisjordanie et Israël, explique Frank Jreij, directeur adjoint de la branche Moyen-Orient de la société. La région de Palmyre, riche en pétrole, appartient à une formation géologique qui s’étend vers le nord du Liban. Plus au Sud, une faille géologique partant de la mer Morte en direction du nord se prolonge dans la vallée de la Békaa. » Des « suintements assez fréquents observés à la surface du sol dans sept ou huit sites » laissent en outre espérer, selon lui, l’existence de pétrole dans le sous-sol libanais.

Une technologie sophistiquée

Pour tenter d’en avoir le cœur net, Neos Geosolutions propose une technologie de pointe. « Les méthodes ont beaucoup évolué. Il y a quarante ans, l’exploration en 3D d’une zone offshore était quasiment impossible, tandis que les études bidimensionnelles manquaient parfois de précision. Les études en 3D ont commencé à se développer dans les années 1970, mais leur coût continue d’être élevé et elles prennent du temps, notamment quand le relief est accidenté, comme c’est le cas au Liban. » Neos Geosolutions s’affranchit de ces contraintes en procédant à un “scan” aérien d’un territoire donné. Cinq types de détecteurs aéroportés sont embarqués sur des avions dont des capteurs de gravité, permettant de mesurer la densité dans chaque zone balayée, des détecteurs hyperspectraux, qui permettent d’acquérir des images d’un grand nombre de bandes étroites, ainsi que des détecteurs électromagnétiques, qui déterminent si l’anticlinal ou autre structure repérée contiennent des particules hydrauliques ou des hydrocarbures. « Les données récupérées par ces capteurs sont ensuite analysées et intégrées à un modèle d’analyse multidimensionnelle qui englobe, par ailleurs, toutes les données géophysiques, géochimiques et géologiques récoltées sur le terrain, explique Frank Jreij. L’État libanais entreprend à l’heure actuelle un travail de balayage terrestre bidimensionnel (…) Ce type de données sera, par exemple, intégré à notre modèle au fur et à mesure du balayage aérien. »

Un projet sans coût pour l’État

L’accord signé avec le ministère de l’Énergie porte sur le survol et l’exploration d’un polygone de 6 000 km2 situé entre le littoral et la frontière syrienne, dans la partie nord du pays. « Nous espérons pouvoir couvrir le restant du territoire dans une étape ultérieure », affirme Frank Jreij.
La première phase du projet actuel consiste à obtenir les autorisations des ministères et des autorités concernées qui permettent de parcourir l’espace aérien conformément aux normes de sécurité et de contrôle des vols.
« Quand ces documents seront obtenus, nous pourrons passer à l’étape d’importation des avions et des équipements en vue du survol de l’espace et de l’acquisition de données. Cette deuxième phase devra durer entre deux et quatre mois. Quant à la troisième phase d’interprétation des données, elle durera entre cinq et six mois. Nous espérons pouvoir livrer des données consistantes d’ici à la fin de l’année. Mais le projet pourrait s’étaler sur 18 mois », précise Frank Jreij.
Sur le plan du financement, les coûts seront exclusivement assumés par Neos Geosolutions, qui a déjà assuré l’ensemble des fonds nécessaires à cette opération, affirme le vice-directeur de la société au Moyen-Orient, sans communiquer le coût de l’opération. « Plusieurs sociétés d’exploration pétrolière ainsi que des sociétés et des fonds d’investissement ont pris part au projet, en apportant les financements nécessaires. Celles-ci ont l’avantage d’avoir un accès privilégié aux données et aux résultats de l’enquête, mais nous prévoyons ensuite de commercialiser notre modèle ainsi que l’ensemble des données disponibles. » L’État libanais encaisse une part des revenus de ces ventes. C’est sur la base des conclusions de cette étude que les compagnies intéressées fonderont leur décision de participer ou non à un éventuel appel d’offres pour l’attribution de licences d’exploration.

Le deuxième projet de Neos Geosolutions au Moyen-Orient

Établie aux États-Unis en 2009, où elle a déjà entrepris de nombreux projets pour le compte de grandes compagnies pétrolières (Shell, Oxy, etc.), la société Neos Geosolutions a entamé il y a trois ans son expansion à l’international, en s’implantant en Amérique du Sud. Trois projets ont déjà été exécutés par la société dans la zone du bassin du Neuquén, en Argentine, dont un projet pour le compte de la compagnie Exxon. En 2011, la société a ouvert un bureau à Abou Dhabi pour élargir ses activités à 14 pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (Mena). Le premier contrat a été conclu en 2012 avec une société européenne intéressée par l’évaluation du potentiel d’hydrocarbures en Jordanie. La signature du contrat avec le ministère libanais de l’Énergie est le deuxième projet de la société dans la région.