Dans un contexte de faible croissance et d’incertitude lié au conflit syrien, certaines compagnies ont décidé de suspendre ou de reporter leurs investissements, d’autres ont été contraintes de mettre la clé sous la porte. Le groupe émirien Majid al-Futtaim, implanté il y a six ans au Liban, dément cependant les rumeurs d’un retrait relayées dans la presse libanaise. « Nous avons lancé nos opérations en 2009, même si la stratégie d’investissement au Liban et les études de faisabilité remontent à 2002 », rappelle Alain Bejjani, le directeur général libanais du conglomérat, présent dans une douzaine de pays avec 27 000 employés, un chiffre d’affaires qui avoisinait sept milliards de dollars l’an dernier, des actifs de 12,5 milliards de dollars et un bénéfice avant intérêt et impôt (EBIT) de 980 millions de dollars en 2014 et de 490 millions au premier semestre de 2015. « Nous avons achevé en 2013 le City Centre Beirut, qui comporte, entre autres, l’hypermarché Carrefour que nous opérons. La fréquentation a augmenté de 20 % en 2014 par rapport à 2013, et de 9,2 % sur les 11 premiers mois de l’année. Et nous poursuivons l’exécution de Waterfront City, un projet immobilier lancé en juin 2011 en partenariat avec Joseph Khoury & Fils, qui s’étale sur douze ans (…) Trois phases ont déjà été amorcées et le projet devrait être finalisé en 2023, comme prévu initialement. » Au total 900 millions de dollars ont déjà été engagés sur un investissement total de deux milliards de dollars.
Le nouveau patron de Majid al-Futtaim, désigné à la tête du groupe en février dernier, reconnaît toutefois que certains délais sont survenus sur le projet du front de mer à Dbayé, qui prévoit la construction sur 260 000 m2 de plusieurs entités résidentielles, d’un parc commercial, de bureaux ainsi que d’espaces de loisirs, d’un coût global de 1,2 milliard de dollars. « Ce retard est dû à trois principaux facteurs : la nature du sol, qui s’est avérée moins solide que prévu. Cela a nécessité des travaux supplémentaires de consolidation de plusieurs millions de dollars, mais surtout une révision des plans d’ingénierie et des projections (…) Ensuite, les délais d’obtention des permis de construire et le contexte politique ont également pesé sur l’avancée des travaux. Par exemple, la disponibilité des travailleurs sur le chantier, majoritairement des Syriens, n’était pas toujours garantie, en raison des tensions » liées à la question des réfugiés, explique Alain Bejjani.
Ce contexte difficile n’a pas pour autant affecté les délais d’exécution des travaux, encore moins les ventes, assure-t-il. « En dépit des imprévus, nous sommes toujours dans les temps par rapport aux délais définis dans les contrats, tandis que des unités résidentielles et commerciales de Waterfront City ont déjà été vendues », se félicite le patron du groupe, soulignant que la majorité des acheteurs sont libanais.

Pas de nouveaux projets en perspective

Aucun nouveau projet n’est toutefois planifié au Liban, du moins d’ici à la fin des travaux relatifs à Waterfront City, précise Alain Bejjani, pour qui la prudence reste de mise.
Dans la région, le groupe n’est pas non plus à l’abri des soubresauts politiques et sécuritaires depuis les révoltes de 2011. En Égypte, le groupe s’est engagé dans des investissements à hauteur de trois milliards de dollars, dont la construction de grands centres commerciaux, de salles de cinéma, etc. Le “Mall of Egypt”, l’un des projets phares, dont l’ouverture est prévue en 2016, comporte, entre autres, la construction de la première piste de ski couverte sur le continent africain, à l’image de celle, inaugurée en 2005, dans le Mall of Emirates, à Dubaï. « 800 millions de dollars ont déjà été investis pour ce projet, dont le coût s’élève à plus d’un milliard de dollars », précise le directeur général de Majid al-Futtaim.
Pour réduire le risque, le groupe, dont la stratégie de développement est notamment axée sur la région Mena, se focalise, pour la grande distribution, sur d’autres zones géographiques.
Fort de droits exclusifs de la franchise Carrefour dans 38 marchés à travers le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Asie centrale, il s’est déjà implanté au Kenya, en Arménie et en Géorgie, et prévoit d’ouvrir un premier magasin Carrefour au Kazakhstan début 2016.