La loi confère aux municipalités la responsabilité du traitement des déchets (décret 8735 de 1974 et décret 9093 de 2002) et le dernier plan adopté par le gouvernement prévoit de laisser la possibilité à celles qui le souhaitent de développer leur propre solution. Plusieurs d’entre elles ont franchi le cap en optant pour du tri à la source ou du tri mécanisé, afin de réduire l’enfouissement et de valoriser au maximum les déchets.

Collecte sans compactage

L’une des clés de ce type de solution passe par le ramassage des ordures sans compactage. Car il empêche la valorisation efficiente des déchets : il n’est plus possible de corriger les erreurs de tri dans les centres de traitement, ce qui réduit la possibilité de récupérer des matières recyclables et affecte la qualité de la matière recyclable qui devra par conséquent être vendue à moindre prix.
Sans compactage, le transport coûte plus cher, d’où l’importance de regrouper des municipalités en zones de service de 10 000 à 100 000 habitants. Pour limiter ces coûts, l’association Arcenciel estime que les centres de tri doivent se situer dans un rayon maximal de 10 km du lieu de production des ordures et dans un rayon de 30 km de leur destination finale.

Tri à la source

Le tri à la source n’est pas facile à mettre en œuvre. Il doit passer par une campagne de sensibilisation adaptée puis par l’organisation d’une collecte porte à porte pour contrôler les sacs et éviter de ramasser les ordures si le tri est mal effectué. Les déchets sont ensuite envoyés dans des centres de tri secondaire où d’une part les composants organiques sont envoyés au compostage et les déchets secs et propres recyclables sont préparés à être transportés vers les centres de valorisation. Le reste est acheminé vers des sites d’enfouissement.
Pour le traitement de 20 tonnes par jour – soit une ville de 50 000 habitants –, il faut compter un investissement initial de 325 000 dollars pour le tri secondaire et de 984 000 pour le compostage (équipements). Les coûts opérationnels (salaires, énergie, entretien, amortissement) sont de 5,11 dollars la tonne pour le tri secondaire et de 8,01 dollars la tonne pour le compostage.

Tri secondaire

Pour Ziad Abi Chaker, fondateur de Cedar Environnemental, « le Liban n’est pas encore prêt à généraliser le tri à la source ». C’est pourquoi, il préconise les usines de tri mécanisées – qu’il commercialise. Il en a déjà construit une à Beit-Méry qui devrait démarrer en avril et il est en négociation pour desservir les municipalités de Kahalé, Bsous et Wadi Chahrour grâce à la construction d’un centre de tri secondaire qui desservirait cette zone de 25 000 habitants. La différence tient à l’organisation de la collecte qui est plus souple – et donc moins chère – autorisant les bennes, mais pas le compactage. Les déchets sont pesés à l’entrée du centre de tri qui facture la municipalité à la tonne. Les déchets organiques sont compostés sur place et les recyclables vendus par l’usine de tri à des clients. L’investissement initial pour un centre d’une capacité de 100 tonnes par jour est de 5 millions de dollars. Cette somme couvre toute l’infrastructure nécessaire : les lieux, l’équipement, les véhicules internes et même une station électrique. La collecte coûte entre 10 et 30 dollars la tonne, et le traitement des déchets 59 dollars la tonne, estime Ziad Abi Chaker.

Antoura : le tri à la source en un mois
Dans le petit village de Antoura, qui compte 4 000 habitants, le tri à la source s’est organisé en moins d’un mois avec l’adhésion de l’ensemble de la population. Le projet a coûté 50 000 dollars alloués entièrement par des associations au financement d’un centre de tri et de compostage pouvant traiter jusqu’à cinq tonnes de déchets par jour. La clé du succès – outre une campagne de sensibilisation – a été de supprimer toutes les bennes, afin d’empêcher la collecte de sacs non triés. La disponibilité d’un terrain relativement éloigné des habitations a permis de créer un espace pour le compostage, tandis qu’une décharge pour les déchets inertes non recyclables a été aménagée près du centre de tri.

Kherbit Slim traite seule ses déchets depuis 2002
S’il y a encore treize ans, la municipalité de Kherbit Slim se contentait de collecter et de brûler ses déchets non triés, elle est aujourd’hui un exemple en matière de traitement des ordures pour une communauté de 12 000 habitants (en ajoutant ceux du village voisin de Sultanié) produisant six tonnes de déchets par jour. Un centre de tri secondaire financé par l’agence Usaid via la mission pontificale au Liban et équipé par Cedar Environnemental y a été construit en 2002 pour un investissement de 400 000 dollars à l’époque. Sur une surface bâtie de 1 500 m2, trois fonctions sont assurées à l’intérieur du centre : le tri, le compostage et la préparation des matériaux triés pour l’envoi vers des usines de valorisation. Les déchets résiduels (sacs en plastique et déchets de boucherie) ne représentent pas plus de 10 % du volume initial et sont enfouis dans un terrain attenant à l’usine. La municipalité collecte elle-même les ordures non triées, mais les transporte sans les compacter pour un coût de 10 dollars la tonne. Les opérations du centre de tri coûtent, quant à elles, 25 dollars la tonne. La facture est couverte en partie par la vente de matériaux recyclables (10 dollars la tonne). Le ministère d’État pour la Réforme administrative verse 25 dollars la tonne en vertu du programme Arla financé par l’Union européenne jusqu’en 2018. Le reste est financé par le budget de la municipalité via les taxes locales et par la Caisse autonome des municipalités (460 millions de livres par an).