Propriété de la famille Sursock, le Grand Hôtel Casino de Aïn Sofar fait partie des bâtiments les plus mythiques du Liban. Bâti à la fin du XIXe siècle sur un terrain de 28 000 m2, il était l’un des premiers établissements hôteliers d’envergure au Moyen-Orient réunissant une clientèle locale mais aussi des visiteurs de marque venus du monde entier. En 1975, l’hôtel cesse de fonctionner. L’armée syrienne réquisitionne le bâtiment principal de 1 400 m2 pour en faire un de ses quartiers généraux. Durant cette période, l’hôtel a été pillé et sa charpente détruite. « Depuis le départ des Syriens, l’hôtel est resté à ciel ouvert », explique l’un des propriétaires principaux, Roderick Sursock Cochrane. Moyennant environ 250 000 dollars, celui-ci a entrepris l’an dernier quelques travaux permettant de préserver le bâtiment. « Pour récupérer cet argent, j’ai proposé de faire ce que je sais faire de mieux, c’est-à-dire organiser des réceptions », explique-t-il. Après l’aménagement de salles de bains et cuisines, le rez-de-chaussée du Grand Hôtel ainsi que ses jardins pourraient bien être la prochaine destination en vogue pour les mariages. « L’idée est de garder l’aspect délabré du lieu, car les grandes réceptions au Liban se font dans des endroits vierges où l’on peut construire un décor complet », poursuit Roderick Sursock Cochrane qui gère déjà l’autre propriété familiale de Sofar : La Villa Donna Maria Sursock. Les jardins de ce palais sont loués entre 8 000 et 15 000 dollars, et accueillent une douzaine de mariages par an. Des prix que le gérant justifie par le fait qu’à Sofar, la saison ne dure que deux mois.
Mais à long terme, le projet est tout autre. « Je cherche un investisseur qui viendrait en collaboration avec notre famille ou qui louerait à long terme. La seule condition serait que le bâtiment principal demeure et que le nom “Sursock” reste attaché à la propriété. Je souhaite créer une destination qui marcherait été comme hiver et qui relancerait l’économie du village », annonce le copropriétaire.
Roderick Sursock Cochrane, héritier de la famille Sursock, n’en est pas à sa première tentative de modernisation du patrimoine familial. Alors qu’il travaille depuis Londres aux achats du groupe de restauration Abela, il ouvre en 1978 un premier restaurant à Achrafié qu’il louera plus tard. Le Retro se transforme rapidement en une boîte de nuit prisée, puis en restaurant français avec La Table d’Alfred, aujourd’hui une salle de réception à côté du bistrot Fred. À son retour de Londres en 1996, il continue sur sa lancée et décide d’ouvrir les jardins du palais familial de Beyrouth pour des réceptions. « La famille a d’abord crié au scandale, mais elle a finalement réalisé que c’était le seul moyen de dégager une source de revenus suffisante pour maintenir cette maison sans apport extérieur », dit-il.
Aujourd’hui, les jardins du palais accueillent quelque 35 événements par an, pour 800 personnes maximum. Le terrain est loué entre 11 000 et 17 000 dollars suivant le nombre d’invités et les frais de bars sont compris entre 12 et 17 dollars par personne. La majorité des réceptions sont des mariages pour un budget total compris entre 80 000 et 150 000 dollars.
Au début des années 2000, Roderick Sursock Cochrane est aussi associé à l’ouverture au public d’une autre propriété familiale : la villa Linda Sursock, passée sous gestion du Bristol Traiteur depuis 2013.  « Comment définir ma profession ? C’est une question que me pose régulièrement ma fille... On peut dire que je suis administrateur des propriétés familiales. »