Un an après l’ouverture du centre commercial ABC Verdun, le CEO du groupe ABC, Frank Matthias Kuntermann, dresse un bilan relativement positif malgré une conjoncture difficile pour le secteur. 


Quel bilan dressez-vous de la première année d’activité de l’ABC Verdun ?

Il est encore trop tôt pour évaluer le retour sur investissement, mais les premiers résultats sont positifs. Le “department store” est entièrement loué et le taux d’occupation dans le reste du centre commercial est de 83 %, ce qui est au-dessus des standards de l’industrie. Je pense que nous arriverons à 90 % d’ici huit à dix mois, sachant que nous maintenons toujours entre 5 et 7 % d’espaces non occupés.

En termes de fréquentation, l’ABC Verdun a accueilli environ 4 millions de visiteurs en un an, contre 6,5 millions pour l’ABC Achrafié et 6,5 millions à Dbayé. Mais cela est tout à fait normal, il faut du temps pour que les gens prennent des habitudes. On considère en général qu’il faut cinq ans pour qu’un mall atteigne sa vitesse de croisière. Je pense que l’ABC Verdun y arrivera plus tôt, car la zone de chalandise est relativement petite, et qu’il deviendra la première destination du groupe d’ici à deux ou trois ans.

Y a-t-il eu un effet de cannibalisation par rapport à l’ABC Achrafié ?

On estime que l’ABC Verdun a capté entre 6 et 9 % de la clientèle d’Achrafié alors qu’on s’attendait à au moins 10 % au départ. Il a attiré une nouvelle clientèle, qui ne fréquentait ni le centre commercial d’Achrafié ni celui de Dbayé, et qui devient régulière. Cela se reflète dans notre programme de fidélité : en un an, nous avons recruté 11 500 nouveaux membres à Verdun et nous continuons aujourd’hui à délivrer près de 700 cartes tous les mois.

Le profil des visiteurs n’est pas forcément le même. Le ticket moyen à l’ABC Verdun est par exemple 20 % plus élevé qu’à Achrafié, qui est lui-même plus élevé qu’à Dbayé. Nous avons remarqué aussi qu’il y avait plus de jeunes : près de 22 % des clients de Verdun ont moins de 20 ans, contre 8 % à Achrafié, ce qui nous a poussés à développer un projet de zone pour adolescents. Nous organisons régulièrement des tables rondes avec nos clients et nos locataires pour comprendre leurs attentes, et nous adaptons notre offre en fonction.

L’ouverture du mall s’est tout de même inscrite dans un contexte économique très difficile. Cela ne s’est-il pas fait ressentir ?

Les douze derniers mois ont peut-être été les pires pour la vente de détail depuis la fin de la guerre civile, une “annus horribilis” pour le secteur. Selon les estimations de la Lebanese franchise association, l’activité a reculé d’environ 15 % en 2017, et de 20 à 25 % au premier semestre de cette année, notamment en raison des élections en mai qui ont plombé le marché. Mais nous avons de l’expérience et nous étions préparés.

À l’échelle du groupe ABC, le chiffre d’affaires a connu une croissance à deux chiffres grâce à l’ouverture de la branche de Verdun, mais toutes choses égales par ailleurs, il n’est qu’en légère baisse par rapport au premier semestre de l’année dernière.

La conjoncture vous a-t-elle contraint à revoir la politique des loyers pratiqués à Verdun ?

Nous appliquons les mêmes tarifs à Verdun qu’à Achrafié, mais nous faisons preuve de flexibilité. Nous rencontrons régulièrement nos locataires et nous examinons avec eux le ratio du loyer par rapport à leur chiffre d’affaires. Si une enseigne est en difficulté, nous n’hésitons pas à la soutenir en lui accordant des incitations. La situation n’est pas la même pour tous. Certains de nos clients vendent 30 % de moins à Verdun qu’à Achrafié, tandis que d’autres font mieux. La restauration, en particulier, marche très bien à l’ABC Verdun.

Globalement le premier semestre a été difficile, mais nous constatons une amélioration depuis le début de l’été, avec notamment l’arrivée d’une clientèle koweïtienne et qatarienne. Le mois de juillet a été le meilleur pour l’ABC Verdun depuis son ouverture.

Quelles sont les perspectives pour 2019 ?

Je suis très optimiste pour 2019 et 2020. Plusieurs facteurs me laissent penser que l’économie libanaise va rebondir, notamment le redressement des prix du pétrole qui devrait alléger la pression sur les pays du Golfe, la conférence CEDRE et les perspectives de reconstruction en Syrie.

 


L’ABC Verdun en quelques chiffres 

- 300 millions de dollars d’investissement.

- Détenu par Bahaa Hariri à 60 % et le groupe ABC à 40 %.

- 150 000 mètres carrés de surface bâtie (120 000 m2 pour l’ABC Achrafié).

- 50 000 m2 de surface commerciale utile (35 000 m2 pour l’ABC Achrafié).

- 450 employés.