Les cofondateurs de LiBeiroot, Amr Kahhale et Omar al-Sakkah
Les cofondateurs de LiBeiroot, Amr Kahhale et Omar al-Sakkah

Depuis environ un an, on peut réserver depuis Beyrouth en ligne un chauffeur pour Damas. L’idée, qui s’inspire du succès de Uber, a été lancée par deux jeunes Syriens : Amr Kahhale et Omar al-Sakkah.

L’histoire commence en 2017 alors que Omar al-Sakkah, 25 ans, étudie le business à Beyrouth. Chaque semaine, il fait l’aller-retour entre Damas et Beyrouth, soit un voyage de trois heures minimum, pour rendre visite à sa famille. Chaque fois, il faut trouver une voiture pas trop défoncée ; disponible à l’heure voulue et, plus important par ces temps de guerre, un chauffeur digne de confiance... Face à ce casse-tête, Omar se met à rêver d’un service de type Uber qui pourrait connecter chauffeurs et voyageurs.

3 000 passagers traversent régulièrement la frontière

Omar al-Sakkah réalise une étude de marché. Selon ses calculs, 3 000 passagers, souvent des étudiants, traversent en taxi ou service la frontière entre les deux pays. Le voyage coûtant 30 dollars en moyenne, il estime que cet “Uber transfrontalier” pourrait représenter un marché potentiel de 75 000 dollars par jour. Problème : il lui manque les capacités techniques pour monter la plate-forme. C’est là que Amr Kahhale intervient. À 26 ans, le jeune Syrien vit aux États-Unis depuis 2011. Il y a finalisé des études d’informatique et a depuis décroché un “job de rêve” d’ingénieur software chez Apple.

Ensemble, ils lancent LiBeiroot avec seulement 5 000 dollars de fonds propres en 2017. La start-up propose de louer un véhicule ou de réserver des sièges dans des services. Les tarifs pour un aller Beyrouth-Damas sont compris entre 10 et 50 dollars, payables auprès du chauffeur. LiBeiroot prélève 15 % sur chaque course effectuée, passant par sa plate-forme.

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Face aux sanctions internationales imposées sur le système bancaire syrien depuis le début du conflit, mais aussi parce que seule une faible part de la population syrienne dispose de cartes de paiement, les transactions se font exclusivement en cash. L’argent est collecté par les équipes de la start-up au Liban et en Syrie.

Une trentaine de chauffeurs

D’ores et déjà rentable, la start-up, qui ne communique pas le nombre de ses clients, se développe grâce aux revenus qu’elle génère. En avril dernier, Kahhale et Sakkah ont même ajouté un service de coursier à l’application. Postaji – c’est son nom – permet d’envoyer des documents, faire des courses, de livrer de petites choses sans avoir à franchir les frontières entre les deux pays… « Postaji est un vrai succès, le service fonctionne aussi bien que les déplacements en voiture », affirme Amr Kahhale. Aujourd’hui, LiBeiroot travaille avec une trentaine de chauffeurs, tous de nationalité syrienne.

« Le fait de travailler en Syrie pose, c’est vrai, un certain nombre de problèmes. Il y a d’abord l’infrastructure et la faiblesse du réseau internet. Nous avons donc dû réduire les fonctionnalités de l’application au minimum. Mais surtout, la frontière libano-syrienne est un lieu où les règles de passage sont fluctuantes. À terme, on souhaite étendre nos services à d’autres villes de la région comme Tripoli, Homs, Alep, Lattaquié et Amman », conclut-il.