La directrice générale du ministère du Tourisme, Nada Sardouk, nous reçoit dans son bureau, parmi ses livres sur le patrimoine archéologique, de vieux vinyles et des piles de documents, témoins de ses longues années de labeur consacrées à l’essor du secteur touristique du Liban. Dans quelques mois, celle qui a incarné l’action du ministère quittera ses fonctions après près de 20 ans passés à superviser.

Pour le Liban, le développement touristique est primordial : entre hôtels, restaurants, boutiques, le secteur compte aujourd’hui plus de 10 000 établissements. Il génère 1,6 milliard de dollars en moyenne et emploie quelque 90 000 salariés, selon la récente étude du cabinet de conseils McKinsey.

Pourtant, Nada Sardouk n’avait pas imaginé devenir l’une des grandes figures de ce secteur. Après des études littéraires et linguistiques en France, elle se destine d’abord à l’enseignement avant de devenir inspectrice pédagogique et d’intégrer le corps des fonctionnaires du ministère de l’Éducation.

Finalement, il faudra Rafic Hariri, qui est alors Premier ministre et veut féminiser la haute fonction publique, pour la décider à prendre du galon. En 2001, elle relève le défi et en devient la secrétaire générale au sein du ministère du Tourisme. « À mon arrivée au ministère, j’étais la plus jeune recrue, se souvient-t-elle. J’ai dû ramer seule, apprivoiser mon environnement et apprendre à connaître mes dossiers en profondeur. »

Depuis, cette passionnée de livres anciens et d’archives a travaillé en tandem avec douze ministres successifs. L’une de ses premières tâches a d’ailleurs été de dépoussiérer les procédures au sein du ministère. « Mon idée était de briser le carcan de la hiérarchie et créer des équipes pluridisciplinaires qui travaillent ensemble à concevoir des synergies. J’ai ainsi interdit aux employés de fermer les portes de leurs bureaux. Les gens comme les idées doivent circuler ! »

Cela n’a pas été facile : le ministère fonctionne sur un budget annuel d’environ 19 millions de dollars, dont la moitié est allouée à des opérations de promotion et de communication. Malgré tout, Nada Sardouk a triplé les effectifs au cours des sept dernières années pour atteindre 210 employés. Les nouvelles recrues, engagées sur concours de la fonction publique et avec l’approbation du Conseil des ministres, occupent des postes variés. Mais Nada Sardouk a renforcé le nombre d’inspecteurs, dont l’effectif a bondi de 12 à 80 aujourd’hui.

À l’heure de refermer une longue page de sa vie, elle se dit fière d’avoir contribué à moderniser son ministère. C’est cependant deux mesures phares de son ministère – l’interdiction de la vente d’alcool aux mineurs et la mise en place du décret régulant les permis des maisons d'hôte en 2009 – dont elle veut avant tout se souvenir.

« Aujourd’hui, il y en a plus de 80 maisons d’hôte à travers le pays. Ce réseau permet de préserver le patrimoine architectural en même temps qu’il crée de l’emploi, notamment pour les femmes. »

La directrice générale a vu le Liban s’ouvrir à de nouveaux marchés touristiques. La plupart dans des pays où une importante diaspora libanaise est implantée. C’est le cas de la ligne lancée par la MEA entre Beyrouth et Madrid en 2018, qui permet aux Libanais d’Afrique ou d'Amérique latine de se reconnecter avec le pays de leurs ancêtres.

Nada Sardouk est décorée en 2015 chevalier de l'ordre national du Mérite par le président de la République française pour les services rendus à l'enseignement de la langue et de la littérature françaises ainsi qu’à la francophonie.