Malgré la demande des épargnants pressés de sortir leur argent des banques, l’intérêt pour les bureaux reste limité. Selon l’agence de conseil immobilier Ramco, il reste environ 100.000 m2 de bureaux à la vente dans la capitale, en lollars et en dollars frais.

À proximité du jardin Sanayeh, plusieurs bureaux sont sur le marché. Les propriétaires demandent des paiements en dollars frais, mais les prix varient d’un immeuble à l’autre.
À proximité du jardin Sanayeh, plusieurs bureaux sont sur le marché. Les propriétaires demandent des paiements en dollars frais, mais les prix varient d’un immeuble à l’autre. Illustration Jonathan Blezard

Le marché d’affaires n’a pas connu la même dynamique que le marché résidentiel et foncier en 2020. Alors que les appartements s’arrachaient à Beyrouth et se vendaient comme des petits pains, les investisseurs étaient réticents à acquérir des bureaux.

«J’ai vendu deux bureaux contre une quinzaine d’appartements l’an dernier. Investir dans des bureaux n’était pas la priorité de mes clients. À leurs yeux, un appartement est plus facile à louer et utile ultérieurement pour leurs enfants», explique un agent immobilier qui a requis l’anonymat.

La Covid-19 n’a pas aidé à valoriser l’immobilier d’affaires. Les différents confinements et la multiplication du télétravail a dissuadé certains acheteurs.

«Suite à la pandémie, la crise de l’immobilier d’affaires est un phénomène mondial et pas uniquement propre à Beyrouth», confirme Walid Moussa, président du Syndicat des agents immobiliers au Liban (REAL).

 
«Suite à la pandémie, la crise de l’immobilier d’affaires est un phénomène mondial et pas uniquement propre à Beyrouth»
 
Walid Moussa
président du Syndicat des agents immobiliers au Liban
 


La morosité du secteur des bureaux à Beyrouth n’est pas récente. Le marché a commencé à s’essouffler dès 2018. Le lancement de nouveaux projets a été plus rare et les ventes ont subi un net ralentissement.

À partir de 2020 une partie du stock des bureaux à Beyrouth a commencé à s’écouler. Les promoteurs des immeubles Sequoia à Badaro, The Address à Jnah, Urban Dreams à Corniche el-Nahr et Spears 88 à Sanayeh ont bien vendu, tout comme les immeubles Sama Beirut à Sodeco et Point A à côté du Grand Lycée franco-libanais, où les disponibilités sont devenues plus limitées.

Les investisseurs n’ayant plus d’options dans le résidentiel se sont repliés vers les bureaux où les propriétaires acceptaient encore les chèques bancaires. «Certains acheteurs se forcent à acheter», avoue Walid Moussa.

Mais malgré la multiplication des transactions depuis dix-huit mois, le stock sur le marché est loin d’être épuisé.

Selon l’agence de conseil immobilier Ramco Real Estate Advisers, il reste environ 100.000 m2 de bureaux à la vente en lollars et en dollars frais à Beyrouth. Ce stock comprend les invendus des promoteurs et quelques reventes de particuliers. Au total, cela représente une centaine d’unités dont neuf immeubles de bureaux en entier.

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«La demande reste limitée. Elle a été touchée par la crise économique locale qui a obligé de nombreuses compagnies à fermer», explique Walid Moussa.

Des prix hétéroclites

Si la majorité des propriétaires demandent des paiements en dollars frais, il reste encore des opportunités en chèque bancaire.

Les prix sont très hétéroclites et peuvent varient de 5000 à 13.000 lollars le m2 et de 2500 à 4500 dollars frais par m2.

Aujourd’hui, il n’y a quasiment plus de bureaux individuels à la vente au centre-ville de Beyrouth. À part, par exemple, les immeubles Stratum, The Atrium, 2 Park Avenue, la grande majorité des immeubles d’affaires du centre-ville appartiennent à des sociétés, des familles et des banques.

Parmi les dernières options, un propriétaire demande environ 13.000 lollars le m2 pour des biens sans parking situés dans la zone de sécurité de la place de l’Étoile. «Un prix qui ne mérite pas d’être mentionné tellement c’est injustifié et incohérent», s’emporte un agent.
Dans le même secteur, un promoteur affiche des bureaux tout neufs, avec des places de parking, mais encore dans leur structure en béton à 10.000 lollars le m2.

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Fin 2019 et début 2020 dans le quartier Foch-Allenby, la société Solidere et d’autres propriétaires avaient vendu leurs bureaux sur la base de 6000 à 7500 lollars le m2. La différence de prix s’est faite sur la présence ou non de places de parking.

À Achrafieh, les options ne manquent pas et les prix peuvent varier du simple au double.

Autour de la place Tabaris, il est possible d’acquérir des bureaux d’environ 100 m2 avec un budget de 520.800 à 718.200 dollars dont 30% doit être payé en dollars frais. À l’opposé, quelques bureaux dans leur structure béton sont affichés à partir de 5600 lollars le m2 à Sodeco.

Le long de Corniche el-Nahr, deux options affichent des prix très contrastés. Un bureau de 95 m2 avec une terrasse de 60 m2 est annoncé à 880.000 lollars (soit environ 7652 lollars le m2 après pondération de la terrasse). À quelques mètres de distance, un bien de 450 m2 est affiché à 5250 lollars le m2.

À proximité du jardin Sanayeh, plusieurs bureaux sont sur le marché. À chaque fois, les propriétaires demandent des paiements en dollars frais, mais les prix varient d’un immeuble à l’autre. L’un demande 4500 dollars frais le m2 quand son voisin affiche 2750 dollars frais le m2. Parallèlement, un investisseur ayant acheté un bureau de 100 m2 en lollars tente de le revendre en dollars frais sur la base de 3250 le m2.

Parmi les opportunités raisonnables, un bureau à Verdun d’environ 430 m2 est proposé 6050 lollars le m2.

Les incohérences des prix d’un immeuble à l’autre montrent que les propriétaires sont perturbés par les conversions entre lollars et dollars frais.

«Le jeu de l’offre et la demande va entraîner prochainement une correction des prix. La faible demande actuelle complique les transactions et avec le temps, les propriétaires vont réaliser que s’ils veulent vendre, ils vont devoir baisser leurs tarifs», conclut Walid Moussa, également président de l’agence immobilière PBM.