C’est en spectateur nonchalant et témoin fortuit qu’aime à se présenter l’ancien reporter de guerre Fouad Elkoury, lorsqu’on l’interroge sur son travail.

À 66 ans, celui qui est aujourd’hui l’un des photographes libanais les plus reconnus s’amuse à explorer ses très riches archives pour créer des expositions qui en disent autant sur les événements qu’il a couverts que sur sa propre personnalité.

En 2017, avait déjà eu lieu “Passing Time“ au Mina Image Centre, qui s’interrogeait sur l’évolution du Liban depuis la guerre et l’errance du photographe.

Cette nouvelle exposition “La mer patrie”, proposée cette fois à la Fondation Dar el-Nimer, aborde la présence des Palestiniens au Liban à travers trois épisodes majeurs : Beyrouth en 1982, le départ de l’Organisation de libération de la Palestine pour Tunis, puis l’arrivée ultérieure en Palestine.

Précisons-le d’emblée : l’essence du propos n’est pas d’offrir un témoignage historique. Comme le souligne Manal Khader, commissaire de l’exposition, il s’agit davantage d’une invitation au voyage à travers des indices et des fragments épars.

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Pour Fouad Elkoury, la guerre de 1975 fut une révélation. Une fois encore, il ne peut s’empêcher de lui accorder la place de choix. L’un des morceaux de bravoure est d’ailleurs l’image de Yasser Arafat de dos, accoudé au bastingage de l’Atlantis, ce bateau qui, en août 1982, l’emmena en Tunisie, sur sa terre d’exil.

Un cliché « historique », quasi « iconique », dont on ne peut s’empêcher de se demander si le photographe ou son sujet furent jamais conscients de son énorme charge symbolique, proche des stéréotypes.

Au-delà de ce questionnement, il faut s’attarder sur la beauté formelle de certaines photographies présentes dans la section consacrée à la Palestine. Comme cette longue fracture qui chemine dans l’asphalte ou la présence évanescente d’une robe de mariée abandonnée sur un portant.

Enfin, il faut absolument découvrir l’installation “Le plus beau jour” déjà présentée à la Maison européenne de la photographie à Paris. Imaginée pour illustrer un poème d’Etel Adnan “To be in a time of war”, elle projette une narration croisée sur trois écrans, montrant comment une image peut en dire bien plus lorsqu’on lui adjoint du texte, une musique… Même si elle n’est pas centrée sur « l’expérience palestinienne » de Fouad Elkoury, elle est un complément indispensable à la première partie de l’exposition.

Dar el-Nimer, La mer patrie, Fouad Elkoury, Tél. : 01/367013‎, jusqu’au 27 septembre 2019.