La plateforme Cedar Oxygen, bénéficiant d’un financement de la Banque du Liban, commence à financer les importations des industriels libanais. 

Cedar Oxygen se propose en tant que fonds de réponse à la crise actuelle et permet aux industriels d'accéder aux matières premières dont ils ont besoin.
Cedar Oxygen se propose en tant que fonds de réponse à la crise actuelle et permet aux industriels d'accéder aux matières premières dont ils ont besoin. D.R.

C’est officiel. Le fonds Cedar Oxygen va commencer par financer deux industriels libanais pour leur permettre d’importer les matières premières dont ils ont besoin. Annoncé il y a plus de six mois, le lancement effectif de ce fonds a été retardé par la pandémie, explique-t-on.

Le premier bénéficiaire est le producteur de pistaches, cacahuètes et noisettes, Castania, qui n’a pas souhaité s’exprimer avant la signature définitive de l’accord. Le second est l’entreprise Technica, spécialisée dans la production de convoyeurs, qui réalise plus de 90% de son chiffre d’affaires à l’étranger. «La signature finale devrait avoir lieu prochainement», se félicite Cynthia Haddad, responsable stratégie chez Technica. L’accord porte sur une ligne de crédit pouvant aller jusqu’à 3 millions de dollars, remboursable sur 4 à 5 mois avec un taux d’intérêt compris entre 6 et 7% selon le montant emprunté et l’échéance.

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Après ces deux premiers accords, la cadence devrait s’accélérer. «Nous avons déjà quatre financements en phase finale, alors qu’une vingtaine d’autres sont en phase de préparation avancée» indique Wissam Ghorra, responsable du développement commercial à Cedar Oxygen.

Une bouffée d’oxygène

«Apporter une bouffée d’oxygène à l’industrie libanaise», tel est l’objectif affiché de cette plateforme. Car depuis le début de la crise fin 2019, les industriels sont privés des facilités bancaires qui leur octroyaient notamment des délais dans le remboursement de leurs fournisseurs. «Solliciter une ligne de crédit auprès de Cedar Oxygen représente désormais la seule option pour les industriels, confirme Cynthia Haddad; à moins qu’ils n’aient les liquidités nécessaires pour payer leurs fournisseurs directement, en puisant dans leurs propres fonds».

Initié par des entrepreneurs de la diaspora libanaise en avril 2020, le fonds Cedar Oxygen est soutenu par l’Association des industriels libanais (AIL) et bénéficie d’un investissement de la Banque du Liban (BDL). Sous juridiction du Luxembourg et opérant depuis Paris et Beyrouth, il agit en tant qu’intermédiaire entre les industriels locaux et leurs fournisseurs de matières premières. Le fonds se chargera de verser les montants dus aux fournisseurs dans les banques étrangères, pour ensuite les récupérer, quelques mois plus tard, auprès des industriels libanais; se substituant ainsi aux facilités de crédits traditionnellement offertes par les banques.

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Pour autant, «Cedar Oxygen n’a pas pour objectif de remplacer les banques commerciales locales, il se propose plutôt en tant qu’alternative et fonds de réponse à la crise», explique Wissam Ghorra. À l’avenir, Cedar Oxygen compte s’établir en tant que plateforme de financement pour l’industrie libanaise.

Au départ, le fonds ambitionnait de lever 750 millions de dollars, mais il n’a bénéficié pour l’instant que d’une enveloppe de 175 millions investie par la BDL. «Notre objectif est de lever entre 200 et 250 millions supplémentaires cette année et atteindre 575 millions de dollars d’ici 2022», indique le responsable du développement commercial à Cedar Oxygen. Le fonds veut solliciter des investisseurs privés, notamment des expatriés libanais, mais aussi des banques de développement internationales.

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Ces montants seront ensuite alloués aux industriels sous forme de crédits à court terme (entre 3 et 6 mois), avec une durée moyenne de quatre mois et un taux d’intérêt autour de 6 à 7%, qui tient compte de plusieurs variables, notamment le risque-pays, la situation financière de l’entreprise et ses clients à l’étranger. À terme, et grâce à ces échéances courtes, l’enveloppe totale pourra être utilisée trois fois pendant la même année, de sorte à ce que les 750 millions de dollars puissent couvrir un montant de 2,25 milliards de dollars par an. «Cela représente la quasi-totalité des besoins annuels des industriels», explique Wissam Ghorra.

En parallèle, l’équipe de Cedar Oxygen s’apprête à lancer une plateforme numérique qui permettrait aux industriels de réaliser entre eux des opérations de change (FX Peer-2-Peer). «Cette plateforme, sécurisée et transparente, permettrait à certains d’échanger des dollars pour s’acquitter de certains frais en livres libanaises, alors que pour d’autres cela permettrait d’obtenir des dollars pour assurer leurs importations. Le taux sera prédéterminé par un algorithme qui tient compte de la demande et de l'offre ainsi que des différents taux actuels», conclut Karl Naïm, directeur du bureau Cedar Oxygen à Paris et responsable des opérations et de cette plateforme fintech.