Suite et fin de l’affaire opposant le PDG de la chaîne libanaise, Pierre Daher, à son ancien partenaire.

La Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI), basée à Paris, a condamné Lebanese Media Holding (LMH) et Rotana Holdings, propriétés du prince saoudien al-Walid ben Talal, à payer des dommages et intérêts à la chaîne libanaise LBCI, jugeant qu’elles n’avaient pas respecté leurs engagements contractuels et qu’elles avaient illégalement rompu leur contrat avec elle.

La chaîne dirigée par Pierre Daher avait conclu en 2008 un contrat de service et de coopération avec LMH, la holding qui regroupait LBC SAT (la version satellitaire de LBCI destinée au monde arabe), LBC+ (qui gérait LBC Europe, LBC Maghreb, LBC America, LBC Australia et LBC Africa) et la société de production PAC.

Cette entité avait été fondée par Pierre Daher en partenariat avec l’homme d’affaires saoudien Saleh Kamel, avant d’être majoritairement rachetée par al-Walid ben Talal en 2008.

À l’époque, l’investissement du prince – dont la mère est libanaise et qui détient l’un des plus grands groupes de production et de média du monde arabe, Rotana – avait été favorablement accueilli par Pierre Daher, qui y voyait une occasion de développer à la fois LBC SAT, PAC et LBCI. Mais les relations se dégradent rapidement entre les deux hommes.

En 2012, al-Walid ben Talal licencie Pierre Daher de LMH, fusionne LBC SAT avec Rotana, dissout PAC et rompt le contrat de service et de coopération avec la LBCI, un an avant son terme. La LBCI saisit alors la Cour internationale d’arbitrage, et obtient deux ans plus tard une sentence partielle lui permettant de récupérer les marques LBC Europe, LBC Maghreb, LBC America, LBC Australia et LBC Africa. Mais il faudra attendre le 21 juin 2018 pour que l’instance rende son verdict final.

Dans le texte de la décision, dont Le Commerce du Levant a pu consulter des extraits, l’arbitre affirme ne pas avoir la compétence de statuer sur les allégations du plaignant selon lesquelles l’investisseur n’a pas respecté ses obligations en matière d’amélioration de la grille des programmes et de la qualité de la production ; mais il reconnaît que Lebanese Media Holding et Rotana Holdings ont rompu leur contrat de manière illégale et porté préjudice à la chaîne libanaise.

La CCI a ainsi infligé au groupe Rotana, qui est basé à Dubaï, de payer à la LBCI plus de 4,65 millions de dollars pour compenser les pertes subies en termes de droits de diffusion ; environ 7,3 millions de dollars pour les pertes de revenus publicitaires ; près de 5,8 millions pour les coûts supplémentaires de la grille ; 5,8 millions pour les ajustements de rendement sur actifs et 4,6 millions de dollars pour le non-transfert des équipements de PAC. Cela représente au total plus de 28 millions de dollars de dommages, auxquels s’ajoutent les intérêts depuis 2012, qui seront calculés sur la base des taux fixés par la Banque du Liban sur les dépôts en dollars.

Mais la LBCI doit, elle aussi, de l’argent au prince. La Cour arbitrale lui a imposé de payer à LMH 8,4 millions de dollars pour le partage des coûts prévus dans le contrat et 264 000 de revenus perçus pour la rediffusion en ligne. Les coûts de l’ensemble de la procédure, qui s’élèvent à plus de deux millions de dollars, devront en revanche être assumés par le groupe Rotana.

La décision de la Cour arbitrale peut être exécutée dans n’importe quel pays où sont présentes les parties concernées.