Le Lycée Abdel Kader (LAK) déménage dans des locaux différents à Zokak el-Blatt. L’héritière de l’ancien Premier ministre, Hind Hariri, récupère ainsi un bâtiment historique et quatre parcelles, d’une valeur estimée à environ 97 millions de dollars par l’agence Ramco. 

Depuis que la propriétaire des parcelles 1934-2109-2111-2112 Mousseitbé, Hind Hariri, a demandé à son locataire, le Lycée Abdel Kader (LAK), de quitter les lieux, les rumeurs vont bon train. À la tristesse des élèves, des parents, des professeurs, du personnel et des anciens du LAK, s’ajoutent les interrogations des habitants du quartier sur le futur usage de ce vaste terrain situé à Zokak el-Blatt, acheté par l’ancien Premier ministre Rafic Hariri dans les années 1980.

Les parcelles ont-elles été vendues? L’ancien bâtiment datant du début du XXe siècle sera-t-il détruit? Achour Holding est-il le nouveau propriétaire? Va-t-on y construire un centre commercial?

Hind Hariri avait assuré en novembre 2018 que le terrain n’était pas à vendre, en soulignant son attachement au bâtiment historique. Depuis, l’un des immeubles de l’école, communément appelé le “château” et situé sur la parcelle 2111 Mousseitbé, a été inscrit sur la liste du patrimoine architectural de la ville.

Le ministère de la Culture a, en effet, décidé en janvier que le bâtiment doit être sauvegardé et ne pourra pas être détruit.

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Mais cela n’a pas mis fin aux rumeurs persistantes. L’une des plus tenaces, notamment sur les réseaux sociaux, veut que le site soit destiné à accueillir un centre commercial. «Cette rumeur est surprenante. Je ne sais pas d’où elle vient. Quel est l’intérêt d’un promoteur de construire un centre commercial à quelques mètres de l’ABC Verdun et des Souks de Beyrouth? Cela n’a pas de sens. Il n’y a pas de place pour trois centres commerciaux dans un si petit périmètre. Construire des logements serait plus approprié et logique», commente Raja Makarem, fondateur et PDG de l’agence de conseil immobilier Ramco SARL.

Les parcelles qui abritaient le Lycée Abdel Kader ont une superficie totale d’environ 16 500 m2 avec quatre façades le long des rues Nakhlé, Lababidi, Chouf et Mar Élias.

Selon le coefficient d’exploitation dans cette partie de Beyrouth, il serait possible d’y construire plus de 111 000 m2 de surfaces vendables. «Le potentiel de ces parcelles est important. Un promoteur pourrait réhabiliter le bâtiment ancien pour en faire une école, un hôtel, un centre culturel et utiliser le reste des parcelles pour y construire des appartements avec des boutiques au rez-de-chaussée. Il serait même possible d’y bâtir une tour de plusieurs dizaines d’étages. Selon nos estimations, ces biens-fonds valent environ 97 millions de dollars», ajoute Raja Makarem.

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La valeur de l’ancien bâtiment classé est estimée à 10 millions de dollars et le reste des parcelles à développer à environ 87 millions de dollars. «L’estimation des parcelles à bâtir se base sur une incidence foncière d’environ 800 dollars le mètre carré de surface vendable. Cette valeur prend en considération, entre autres, les prix des appartements dans le quartier qui commencent autour de 2 500 dollars le m2 après négociation», précise Raja Makarem.

Mais quel promoteur serait capable de payer une telle somme dans le contexte actuel de crise immobilière et de resserrement du crédit? La rumeur a évoqué Achour Holding comme futur propriétaire. Le promoteur a toutefois démenti l’information.

«Les acheteurs potentiels sont finalement peu nombreux. Un projet sur cette parcelle coûterait plus de 300 millions de dollars et un tel investissement dans la conjoncture actuelle serait un véritable défi. Quel promoteur peut-il envisager de commercialiser 111 000 m2 de surfaces vendables, soit plus de 600 appartements, alors que les invendus à Beyrouth n’arrivent pas à s’écouler? L’autre option pour Hind Hariri serait d’allotir le site en ouvrant de nouvelles routes, de délimiter de nouveaux petits terrains et de les commercialiser individuellement. On dit aussi que la propriétaire et son mari voudraient utiliser le site pour y ouvrir une université. Le feuilleton n’est donc pas terminé», conclut Raja Makarem.